" J'étais toqué un peu. J'étais persuadé que tout ce que je voyais se trouvait vraiment et réellement, en tout vrai mais en tout petit dans ma tête. Si j'étais au bord de la mer, j'étais sûr que cette Méditérranée que je voyais se trouvait aussi dans ma tête, pas l'image de la Méditérranée mais cette Méditérranée elle-même, minuscule et salée, dans ma tête, en miniature mais vraie et avec tous ses poissons, mais tous petits, avec toutes ses vagues et un petit soleil brûlant, une vraie mer avec tous ses rochers et tous ses bateaux absolument complets dans ma tête, avec charbon et matelots vivants, chaque bateau avec le même capitaine du dehors, le même capitaine mais très nain qu'on pourrait toucher si on avait des doigts assez fins et petits. J'étais sûr que dans ma tête, cirque du monde, il y avait la terre vraie avec ses forêts, tous les chevaux de la terre mais si petits, tous les rois en chair et en os, tous les morts, tout le ciel avec ses étoiles et même Dieu extremement mignon. "

Le livre de ma mère, Albert Cohen


J'en était là de mes pensées, lorsque, sans que rien en eût décelé les approches, le printemps entra subitement dans le monde. C'était un soir; vers cinq heures, un samedi : tout à coup, c'en est fait, chaque chose baigne dans une autre lumière et pourtant il fait encore assez froid, on ne pourrait dire ce qui vient de se passer.
(...)
Aurais-je longtemps le sentiment d'un merveilleux quotidien ? Je le vois qui se perd dans chaque homme qui avance dans sa propre vie comme dans un chemin de mieux en mieux pavé, qui avance dans l'habitude du monde avec une aisance croissante, qui se défait progressivement du goût et de la perception de l'insolite. C'est ce que désespérément je ne pourrais jamais savoir.


Le paysan de Paris, préface à une mythologie moderne, Louis Aragon


Une fille nue nage dans la mer
Un homme barbu marche sur l'eau
Où est la merveille des merveilles
Le miracle annoncé plus haut ?


Paroles, Jacques Prévert

je remonte à contre-courant la force du torrent qui m’attire à toi

Je ferais sans, Pauline croze